Un promenade littéraire en picard et au fil du temps vous tente ? Laissez vous porter par ce premier numéro de Ch’Lanchron pour le troisième millénaire ! Nous allons remonter le fil des siècles, pour arriver en 1837. À L’époque, l’écriture faisait fi des machines mécaniques ou des claviers électroniques. Elle se contournait de pleins et de déliés, telle cette "pièce récréative" dans un grenier d’Huppy (Somme). Si la première lecture déroute quelque peu le novice, l’amateur éclairé y décèle une qualité de langue picarde certaine. Tel un jalon posé par Furcÿ Mellier, jeune apprenti alors en place à Abbeville, ce texte picard n’a pas vieilli ! Nous le découvrons aujourd’hui, deux siècles plus tard, dans un langage que nous comprenons sans peine. Les rédacteurs de Ch’Lanchron nous ont utilement débroussaillé le chemin en expliquant quelques traits de vocabulaire, et en nous proposant une lecture comparative de l’original accompagné d’une version contemporaine.
Une minutieuse enquête a permis aussi de retrouver des traces de ce récit du voyage d’un paysan en la grande ville d’Amiens, et l’exploration de son église cathédrale. Naïveté, humour et bon sens sont dans la narration qu’il en fait à son ami, de retour au village. Cette histoire viendrait du fond du XVII ème siècle. On en connaît des versions dialoguées plus tardives au XVIII ème , puis une nouvelle présentation, imprimée par le chercheur Alcius Ledieu au début du XX ème siècle. Voici maintenant ce manuscrit daté du 26 février 1837 qui apporte une étape supplémentaire, prouvant que le picard n’a pas gramint changé. On parle toujours de "sacs ed troubes", "d’étabe à vaques" de "pouldinne" et de "berquers" ! Le nouveau millénaire ouvrira-t-il une époque linguistique différente ? Ch’Lanchron tend à nous démontrer le contraire.
Pensez en picard !
Imaginé pour les 20 ans de la revue l’an dernier, le jeu "à l’tcheue leu leu" propose aux lecteurs de créer un texte à partir de quelques mots laissés en pâture. Et comble du succès, les écrivains en herbe se multiplient chaque trimestre. Du Santerre au Vimeu, d’Amiens au Hainaut, huit auteurs ont disserté en adaptant les termes à la prononciation locale, ce qui colore les peintures de cette une joute amicale. Il ne vous reste plus qu’à vous mesurer à votre tour avec la série "gramint - éne croésèe - un treu - éne haillure - warder - déquértcher " Mettez les à l’tcheue leu leu, pensez en picard et bonne chance !
Internet aussi pense picard. Chaque livraison de Ch’Lanchron dissèque un site picardisant. Cette fois, c’est à Lille que nous allons apprendre l’histoire, le statut linguistique, et la littérature picarde. Les autres chroniques sont toujours présentes : un clognon à "Tcho fakir" par ci, une critique littéraire "liries" par là. Mais le corps d’éch
jornal picard reste composé de toute la vie du picard d’aujourd’hui. Les poésies du pays viennent de l’Artois avec Raymond Coudert, de Marc Sellier (Ponthieu), ou de chez Elisabeth Manier à Escarbotin. La nouvelle est belge avec Marc Fauvaux (de Wiers). Les souvenirs sont ruraux avec Léopold Devismes qui évoque "chés teupiers", ou en automobile pour Gilles Toulet (val de Somme). La bande dessinée est placée sous le trait de Jean-Bernard Roussel et sous le signe de la traçabilité de l’alimentation.
Les articles d’actualité ne manquent pas d’exprimer l’humeur d’Edwige Fontaine (Nibas) qui s’insurge de l’arrogance d’un Paris Dakar, ou encore celle de Jacques Dulphy (Bourseville) et de Jean-Luc Vigneux (Abbeville) qui relatent, en dialogue ou en fable, le conflit entre littérature, fiction et pédagogie, contre obscurantisme et tabous : une réflexion qui n’échappe pas à la liberté d’expression propre au caractère d’ici. Nous terminerons notre parcours dans un voyage nocturne dans les rues d’Amiens en bonne compagnie, celle de Charles Caron et de toutes les statues descendues de leur piédestal !