En couverture du trimestriel, cette fois, un cliché "Brique et pierre" : un des symboles du bâti picard, aux rayures horizontales rouges et blanches alternées. Le voici, tout comme Ch’Lanchron est, à sa manière, l’emblème du parler picard vivant. Avec cet arrivage printanier, nous ne serons pas démenti. Notre parler régional s’exprime à plein, et avec tous les moyens à sa disposition : conte, poésie, fable, bande dessinée, nouvelle... les genres se côtoient avec bonheur dans ce numéro 52, par ailleurs richement illustré.
Le picard au siècle des lumières
La revue ouvre sur une ode au mois d’avril (ch’moé d’avri i m’o dit...) de Jean-Luc Vigneux, d’Abbeville. Il est aussi l’auteur de la nouvelle "Jehan Clabaut", qui se situe au cœur du siècle des lumières. Nous sommes plongés dans les réflexions de ce meunier qui n’a pas vu le monde changer autour de lui. La mouture, ce travail qui a animé sa vie, lui a emporté ses années. L’eau de la Somme qui, sans cesse, actionne la roue à aube, l’a dévoré. Jehan Clabaut n’est plus de son siècle, et aujourd’hui sa vue baisse. Le regard de l’auteur nous transpose deux bons siècles en arrière, mais l’actualité du thème n’échappera pas au lecteur.
Ch’Lanchron, s’est encore l’occasion de découvertes littéraires. Le président des Rosatis d’Artois, Jean-Claude Vanfleteren, d’Arras, nous présente une de ses poésie : "un cop d’ramon". Le Vimeu nous apporte lui trois nouvelles signatures dans la revue, avec MM. Manier (Friaucourt), Frété (Mons-Boubert), et Cozette. Une des lectrices du journal, Mme Olivier (d’Airaines) propose une "rétchète pour un Lanchron"... qui pourrait être édité en timbre poste rond "conme un solé". Pourquoi pas ?
De nouveaux picardisants, mais aussi des "piliers" de l’écriture
L’inspiration n’a pas abandonné pour autant les auteurs les plus confirmés que nous avons plaisir à retrouver dans ces colonnes. Jacques Dulphy (Bourseville, Vimeu), avec une fable éch batieu d’chés fromions, ou avec une nouvelle (cho’d darène cigarétte) manie avec précision un vocabulaire riche et imagé qui enrichit le patrimoine dialectal. Ch’cordonnier d’Bérné (Ponthieu), Pierre Duquet (Val de Selle), Aimé Savary (Doulennais), Élisabeth Manier (Vimeu), Valéry Dècle (Santerre), Gisèle Souhait (Nord-Amiénois) excellent chacun dans leur style, et ces textes variés rendent la lecture de Ch’Lanchron particulièrement agréable.
Ch’Lanchron est aussi une lieu d’information, et les articles ou reportages alternent avec bonheur. Saviez-vous que Paul Mahieu, le poète tournaisien (Hainaut) venait de fêter ses 50 ans de poésie ?... Voyez donc en page 26 ! Voulez-vous partir à la recherche et la sauvegarde des "larris" picards, de leur faune et de leur flore ?... L’article est en page 29. Avez-vous idée du nombre et de la qualité des dernières publications intéressant la langue picarde ?... Consultez les "liries" qui vous guideront dans un choix où la critique ne se fait pas complaisance, à l’occasion.
Les beaux jours du parler picard
L’effeuillage de la revue ne serait pas complet si nous omettions de mentionner la présence de Pierre Deglicourt, dont le parler est une heureuse" dravie" (mélange) entre Vimeu et Amiénois ; celle encore de Serdu, le dessinateur et caricaturiste tournaisien, dans une bande dessinée à l’humour grinçant ; et enfin celle d’Eugène Chivot, qui vient de publier son quatrième recueil de textes : Rinchétte, et dont le succès est confirmé par un public plus fidèle et plus nombreux chaque jour. Le picard a encore de beaux jours devant lui comme le dit Gadrouille, l’éditorialiste de Ch’Lanchron, dans un article que nous vous laissons savourer en version originale dès la troisième page de Ch’Lanchron nº52 !