Ch’Lanchron présente les chansons picardes d’André Nattiez
ANDRÉ NATTIEZ
dit « Tchot Nat »
(1887 - 1954)
André Nattiez gagnait sa vie comme représentant en vin (travaillant notamment pour le champagne Mercier), mais il consacra la plus grande partie de son existence au théâtre amateur, à l’animation culturelle de la ville d’Amiens et à la défense et illustration du folklore picard.
Dès l’âge de dix ans, il s’était fait engager pour chanter dans le chœur des gamins de Carmen. Disposant d’un accès privilégié au Théâtre d’Amiens dont il fréquentait assidument les coulisses, les cintres et les loges, il acquit une grande connaissance du théâtre lyrique de l’époque, un peu oublié aujourd’hui : Le bossu, Les deux orphelines, Les pirates de la savane, La porteuse de pain, La tour de Nesle, Roger-la-Honte mais aussi Mireille, Manon ou Werther. Trois ans plus tard, en 1900, il met fin à sa carrière d’acteur-enfant, mais c’est pour mieux entrer à « La Jeune Comédie » comme acteur amateur où, entre 1902 et 1932, il jouera dans des pièces de Labiche, de Théodore de Banville ou de Courteline, d’Edmond Rostand, de Tristan Bernard ou d’Erckmann-Chatrian, parmi bien d’autres. En raison de sa petite taille, il se distingue non dans les rôles de jeune premier, mais dans des rôles comiques de composition.
Il participe à la première grande guerre dans les 8e et 48e Bataillons des Chasseurs à Pied. Deux fois blessé, il reçoit la Médaille Militaire et la Croix de Guerre. C’est là que, pour ses camarades, il chante pour la première fois Grand-mére à poussiére qui devient sa chanson picarde-fétiche à côté de nombreuses autres comme Ch’l’araignée ou En rvenant d’chez Barnum, accessibles sur le présent site. Il ne manquera jamais de les entonner, avec une conviction et une énergie appréciées de tous, dans les nombreuses rencontres des sociétés les plus diverses auxquelles il participe le restant de sa vie comme chanteur, fin diseur et conteur exquis : le Foyer des enfants abandonnés, où il apparait volontiers déguisé en Père Noël, le comité de l’Amiens Athlétic-Club, le Conseil des Directeurs de la Caisse d’épargne, témoignant ainsi de son engagement autant artistique que social. Sans oublier la présidence des Anciens chasseurs à pied de Picardie et celle du Syndicat des représentants en vins et spiritueux. En 1933, il fonde une autre société théâtrale, « Amiens-Comœdia ». On ne s’étonne pas qu’il ait reçu aussi bien les Palmes académiques que la Croix du Mérite social.
Toujours désireux de promouvoir le folklore picard, il aura été membre du « Rosati Picards », une société savante et littéraire amiénoise se consacrant à la défense et l’étude des traditions et des activités artistiques locales, créée au début du XXe siècle et toujours active. C’est dans ce contexte qu’il enregistra les trois chansons picardes qu’il est possible d’entendre ici.
Jean-Jacques Nattiez
(petit-fils d’André Nattiez)
« Chés troés canchons
à Tchot Nat »
Les trois chansons interprétées par André Nattiez nous sont parvenues grâce à ses petits-fils, Jean-Jacques et Renaud, qui ont adressé l’autorisation de la présentation sur ce site et la diffusion des œuvres de leur grand-père à « Ch’Lanchron ».
Les enregistrements originaux ont été diffusés originellement par Pathé vers 1932 ou 1933, sur disques 78 tours.
À l’époque de l’entre-deux guerres, les firmes commerciales ont enrichi leurs catalogues de « disques régionaux ». La chanson picarde a ainsi été représentée par André Nattiez, quand la chanson ou le théâtre lillois l’étaient par Léopold Simons et Line Dariel (toujours chez Pathé avec des n° de références très proches de ceux de Nattiez).
Ce fut également le cas chez Parlophone, société qui a proposé dans son catalogue 1933, le répertoire de chansons picardes de l’Amiénois Robert Capel alias Lepac, de son nom de scène, (par ailleurs ami d’André Nattiez); simultanément avec la chorale « Les chanteurs du Comminges », et les berceuses corses de Tino Rossi !
In rvenant d’chez Barnum
Disque Pathé n° X. 94096 (n° 203197-8)
Paroles de Louis Seurvat (1902)
Sur l’air de « En revenant de la Revue »
Nous reproduisons ce sonnet, paru dans le journal amiénois « Le Cri du peuple » (le 16 décembre 1951) avec la mystérieuse signature « KODAC ».
André NATTIEZ
Par la taille petit, par le talent…immense
Fieffé bonimenteur, prestigieux comédien
Cousin de Rabelais, Docteur ès truculence
Sensible mais narquois, goguenard mais humain…
Poquelin eût prisé le savoureux bonhomme
Et le Roy et la Cour se fussent ébaudis
De ce Lafleur mué en Bourgeois gentilhomme
Échouant, un beau soir, à l’Asile de nuit…
Les ans n’ont point tari son rire, ni sa verve
Le champagne, il est vrai, tonifie et conserve :
La Jeune Comédie est pucelle en son cœur…
Il anime, il entraîne, il danse, il cabriole
A la scène, au micro, blagueur et toujours drôle :
Avec Nattiez, parbleu, c’est le pas de Chasseur !
Kodac
André Nattiez vu par l’Amiénois Jean Bléhaut
L’artiste amiénois Jean Bléhaut (1910-1988) se plaisait, entre autres, à dessiner le portrait de personnalités locales. Il n’épargnait pas non plus ses amis.
Dans le domaine de l’édition en picard, Jean Bléhaut a notamment illustré le recueil « Histoères ed Lafleur » d’Edgar Droyerre (édité fin 1952) où l’auteur met en scène un Lafleur et un Tiot Blaise souvent grivois.
De nombreux textes d’Edgar Droyerre (1899-1968) ont été dits ou récités par André Nattiez lors de ses prestations. L’auteur considérait son interprète et ami comme un « fameux comédien, grand diseu d’contes ed Robert Mon Onque et pi d’histoères ed Lafleur ».