Les propositions de
« Ch’Lanchron »
sont rendues publiques
Deux feuilles, imprimées sur duplicateur à encre, ont été distribuées à la presse et aux participants à la séance plénière de clôture des Assises régionales de la Recherche en novembre 1981.
Les deux premiers numéros de « Ch’Lanchron » avaient été imprimés selon la même technique de stencyls en soie frappés par une machine à écire mécanique, sur le même matériau de papier recyclé. La diffusion des informations en faveur de la défense de la langue picarde a alors bénéficié du savoir faire de « Ch’Lanchron » !
Les pistes proposées par « Ch’Lanchron » en direction de la promotion du picard, dans une perspective ouverte de valorisation des différentes expressions de la culture régionale, avaient été également approuvées par l’Amicale des Indiens picards (artistes et acteurs culturels amiénois).
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30 ans plus tard…
Au-delà de ses publications et des spectacles que « Ch’Lanchron » produit, c’est l’ensemble de ses actions qui a été saluée en 2010 lors de son trentième anniversaire. Le Courrier picard lui a alors consacré un cahier spécial de 4 pages que vous pouvez télécharger.
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Introduction
Nous avons participé aux deux réunions de travail des 12 et 23 octobre 1981 du groupe n°12 sur le thème : « cadre de vie et patrimoine culturel ».
Notre association s’est donnée pour but de « faire vivre la langue picarde » et à cette fin publie le trimestriel tout en picard « Ch’Lanchron ». Elle anime d’autre part des soirées picardes sous le titre « Cassigoutte ». Nous sommes donc des usagers de la langue picarde, la recherche dialectale n’étant pas l’activité principale de l’association.
C’est à ce titre d’usager que nous faisons les propositions suivantes afin d’apporter notre contribution, et éventuellement notre collaboration, à la connaissance et au développement du patrimoine linguistique régional : le picard.
Proposition pour la connaissance de la langue picarde
L’inventaire général de la langue picarde (Atlas Linguistique et Thésaurus, les seuls à ne pas exister en France) reste à établir, après la disparition du professeur Loriot (en novembre 1980) qui avait été chargé de ce travail. Le but est de réunir dans un même ouvrage (sous forme de dictionnaire) tout le vocabulaire du Domaine Linguistique Picard.
Il ne s’agit pas là de faire un « herbier » du vocabulaire mais un « jardin », reflet de la culture locale, constituant une bas essentielle pour la production littéraire, théâtrale, etc. Il existe à l’heure actuelle de nombreux lexiques locaux (importante source de documents sur le cadre de vie ancestral) et des lexiques de métiers (source de documents sur les technologies locales traditionnelles). Cependant, cet ensemble n’est pas complet, tant au niveau géographique que professionnel.
Propositions isolées et concrètes
La création d’une bibliothèque (inter)régionale regroupant les ouvrages portant sur les écrits en picard, les écrits sur la Picardie, et les écrits de Picards, premettrait d’offrir au public la possibilité de s’intéresser à leur patrimoine (linguistique mais aussi culturel, architectural, musical, etc…), sans avoir à se désespérer dans des recherches longues et laborieuses dans les bibliothèques municipales. Cet établissement devrait rassembler les ouvrages publiés mais aussi les manuscrits divers, affiches locales (en français ou en picard) voire une discothèque et une sonothèque.
On peut également imaginer la création d’un centre de « dépôt légal picard » et de dépôt de manuscrits, thèses, ou autres documents de la Picardie administrative, linguistique, historique, etc. intéressant les géographes comme les musiciens, les écologistes comme les linguistes, les archéologues comme les géologues, les architectes comme les naturalistes,… La création de la bibliothèque (inter)régionale serait un élément de valorisation de la langue picarde.
L’expression orale de la langue picarde ne doit pas être limitée à un mode d’expression folklorique sans saveur. Il convient de laisser aux Picards leur langue et de valoriser les modes d’expression originaux qu’ils ont su et savent développer (poésie, chanson, théâtre, contes et récits, théâtre de marionnettes…).
Cependant, il ne faut pas se tromper sur les moyens mis en œuvre, par exemple, un musée des Cabotans (marionnettes à tringle et à fils) ne constitue pas une fin en soi : Lafleur doit vivre, bouger, chanter, boire, faire rire, etc… et pas seulement dormir. Il ne s’agit là bien-sûr que d’un exemple. Le développement de l’expression du picard en milieu rural et ouvrier est une des garanties du succès des entreprises de connaissance et de valorisation du picard et de l’adhésion de la population à ces travaux.
Une proposition plus rapide à mettre en œuvre, plus spectaculaire peut-être, intéresserait directement toute la population habitant dans le domaine linguistique picard. Il s’agit de « doubler » les panneaux routiers d’entrée de village, par un panneau portant également le nom du village en picard. Par exemple : Ault et Bourq-éd-Eut, Abbeville et Adville, ou même des formes anciennes inusitées telles que : Albert et Inque.
Le panneau pourrait être écrit en blanc sur fond marron afin de ne pas rebuter les non-initiés. De telles initiatives se rencontrent déjà à travers la France (en Catalogne, par exemple), et constituent une image extérieure du patrimoine linguistique local qui est le reflet du visage réel et quotidien du pays concerné. Ceci constitue de plus un très bon moyen de déculpabiliser les gens qui parlent picard.
Il serait souhaitable que les documents cartographiques (le cadastre en particulier) ne négligent pas les appellations de lieux en parler local. La toponymie constitue une richesse historique dont la trace est bien souvent difficile à retrouver ailleurs (car disséminée dans divers ouvrages).
Conclusion
De telles initiatives associeraient nécessairement usagers, « consommateurs » d’une part, et spécialistes, chercheurs d’autre part. L’élaboration de ces projets permettra à très brève échéance de donner à notre région le moyen d’expression original ancestral dont elle dispose encore, mais qui risque sinon de devenir une langue morte avant le troisième millénaire.
Nous nous sommes limités dans cet exposé de propositions aux seules questions concernant l’aspect linguistique du patrimoine picard. Nous sommes en outre également attachés aux autres manifestations ou moyens d’expression du patrimoine culturel : les sports traditionnels picards (jeux de balle, choule, etc…) ; la musique ; le paysage picard (haies, essences végétales, zones humides, littoral, etc…) ; les témoignages simples du passé quotidien (puits, mares, places de village, croix de fer, croix de pierre, halles, etc…) ; le passé historique et archéologique de la région (lieux de batailles, de traités,… maisons gallo-romaines, oppidum, etc…) ; ceci ne constitue bien évidemment pas une liste limitative.
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À l’automne 1981,
« Ch’Lanchron »
s’engage
activement pour la
défense du picard
La langue picarde est (comme toute langue régionale) un élément primordial du patrimoine. Elle constitue tant par son vocabulaire, sa grammaire, son étendue géographique (ici le « Domaine Linguistique Picard »), ses variations locales, etc. un capital essentiel pour notre région.
Ce patrimoine ancestral élaboré lentement au cours des siècles est en danger (comme bien des aspects du « patrimoine » abordés en débats dans la commission « cadre de vie et patrimoine culturel »). Sa destruction, commencée avec les bouleversements dus à la deuxième guerre mondiale, risque de provoquer la disparition complète de cette langue. Des siècles de mémoire locale risquent de s’éteindre en quelques 40 à 50 années.
Sans disserter sur le bien-fondé de sauvegarder le picard (comme toutes les autres langues régionales), il convient de noter qu’une langue est avant tout une part du patrimoine de ceux qui la parlent et la pratiquent. C’est dans cette optique que nos propositions sont originales. L’aboutissement de ces travaux doit être à la disposition du public, des Picards et des Picardisants en particulier.
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Le talent de « Ch’Lanchron »
Une reconnaissance officielle, en janvier 2006 : celle du Conseil général de la Somme, qui a décerné un Talent d’or à « Ch’Lanchron » pour l’ensemble de son action de défense de la langue picarde.
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